Construction de l’ascenseur de la Tour du Signal par F5JPV

Le fichier de présentation en PDF: ASCENSEUR DE LA TOUR DU SIGNAL PAR F6DPH

L’idée consistant à réaliser un ascenseur à la TOUR DU SIGNAL m’est venue en écoutant Philippe F6DPH me demander comment il serait possible de démonter la structure métallique verticale interne à la tour pour faire « propre ».

C’est une sorte d’échelle de un mètre de largeur constituée de montant verticaux en fer U de 140 m/m, entretoisés par des cornières espacées de 70 cm de chaque côté.

L’ensemble est maintenu par des poutres en I transversales ancrées à la tour, le tout fixé uniquement par vis et écrous (aucune soudure).

Initialement cette échelle servait au maintien des guides d’ondes. Une telle structure, parfaitement rectiligne, m’est apparue comme étant une chance inouïe pour un tel projet.

J’aurais aimé me servir des fers U comme guides mais ceux-ci comportent tous des vis de fixation et des plaques de raccordements incompatibles pour des galets de guidage.

Alors l’idée a été de fixer sur cette structure des rails de 70 m/m dans lesquels viendraient se loger des galets réglables.

Une fois le décor planté (dans nos têtes) et après avoir fait le tour des besoins et des possibilités, à peine rentré au QRA, je planchais immédiatement sur les dessins.

Plans sur calque et au Graphos s’il vous plaît !

Philippe « De La Tour » venait régulièrement me rendre visite et, autour d’un petit café, nous commentions l’avancée de l’étude en y apportant à chaque fois des modifications et de nouvelles idées. C’était parti !

DEBUT DE LA REALISATION.

A partir des plans, notre ami Philippe (un autre) F8BTP, fraiseur / tourneur de métier, approvisionnait toute la ferraille, coupait le tout parfaitement à longueur et réalisait toutes les pièces nécessaires à la mécanique (axes de galets, cornières etc.).

Le montage de la cage d’ascenseur a été réalisé par Philippe F6DPH et moi-même dans un immense local à Chartrettes.

Tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes comme on dit, aucune difficulté particulière, que du bonheur, jusqu’à finir la cage avec ses deux portes rideaux, superbe ! Trop beau tout cela ! Eh oui, forcément…

Un doute nous est apparu. Quelle largeur exacte faisait la porte d’entrée de la tour ?

Après un échange téléphonique avec un maçon sur place, l’info tombe brutalement et sans équivoque.

Il manque 20 m/m ! Nous comprenons que c’est la première « conn. ». Courage ! Et il en faut… Même pas peur ! On va couper la cage en deux, la raccourcir de 20 m/m et la ressouder. Si tôt dit ; si tôt fait. La soudure à l’arc c’est magique !

LES PREMIERS TRAVAUX A LA TOUR.

La première semaine est très harde et assez dangereuse.

Eh oui : il faut savoir que notre belle structure métallique, pesant des tonnes, n’existe pas sur les 7 premiers mètres, ni même au dernier étage dans la station.

Heureusement, cette structure avait été doublée dans un second temps, sûrement pour des besoins supplémentaires.

Alors le jeu consistait à démonter les poutres nécessaires afin de reconstituer les manques.

Sauf que tout cela se passe dans le vide et que les poutres de 140 m/m par 6 mètres pèsent pratiquement 100 Kg.

Pour ce faire, nous avons installé une chèvre à l’entrée de la porte supérieure, ainsi qu’une poulie provisoire sur le plancher, à la verticale de la structure. Ensuite j’ai pris mon courage à deux mains.

Equipé de mon harnais de sécurité je me suis accroché sur la structure, dos au vide, tel « l’Araignée », enfin presque.

Il fallait alors élinguer les poutres au câble de la chèvre puis déboulonner les plaques de raccordement en faisant très attention au balan et au poids.

Pas le droit à l’erreur car j’étais seul, Philippe étant aux commandes de la chèvre tout en haut de la tour.

Le travail de reconstruction de la structure a été réalisé en une semaine exactement et nous en étions très satisfaits car cela représentait une réelle difficulté et une dangerosité dont nous avions pleinement conscience.

La seconde semaine est consacrée à la mise en place des quatre premiers guides de trois mètres sur le bas de la structure, de la mise en place du cadre de guidage puis de la fixation de la cage sur le cadre.

Le motoréducteur est en place, bien fixé au sol avec des chevilles chimiques. Cela commence à «avoir de la gueule». Moins facile sera la fixation de l’ensemble des poulies au plafond de la tour.

C’est assez lourd, il nous faut les étayer pour les maintenir en place et percer le béton, fixer tout cela avec des tiges filetées de 20 m/m.

Mais dans l’ensemble pas de surprise, tout se passe très bien. Mieux encore, nous avons de l’avance sur notre planning. Là encore cela m’inquiète, c’est trop beau.

La troisième semaine consiste d’abord à monter un plancher provisoire «sur» la cage d’ascenseur.

En effet, ce plateau va nous servir d’échafaudage réglable à volonté pour monter et fixer au fur et à mesure les 30 barres de guidage restantes jusqu’en haut (51 mètres).

Ce plateau provisoire je vais le surnommer « le plateau de fromage ». Explications plus tard.

Ensuite c’est le moment « jouissif » ! Nous allons mettre en place les câbles de traction.

Pour ce faire il nous faut les étaler le long de la route sur 220 mètres pour ne pas faire de pli. C’est super, sauf que… Tout se passait trop bien.

Arrivé à 130 mètres, le dévidoir est VIDE !

Erreur dans la commande. Il nous manque la moitié du câble. Nous sommes dépités.

Si près du but. Mais nous décidons quand même de monter un câble sur deux.

Mes beaux guides devraient permettre d’effectuer les premiers essais et de confirmer que la cage reste bien verticale avec un seul câble sur le côté.

Mais, un emm. n’arrive jamais seul. Dès le premier essai de levage, notre surprise est la vitesse de montée beaucoup trop rapide.

Ensuite nous voulons tester « l’irréversibilité » du motoréducteur en libérant le frein électrique.

Stupeur ! La cage redescend de tout son poids (260 Kg).

Même à un mètre de hauteur cela fait du bruit ! Alors à partir de ce moment le moral en prend un grand coup !

Non seulement il y a l’erreur dans la commande du câble, mais le motoréducteur ne correspond pas du tout au cahier des charges.

Philippe pensait que la belle vis sans fin en bronze à l’intérieur du carter rendrait le fonctionnement irréversible mais en réalité le pas de cette vis sans fin est trop incliné. C’est mort !

Nous sommes bloqués et dans l’immédiat nous n’avons pas de solutions à nos problèmes.

Nous prenons la décision de mettre en place un contrepoids de 210 Kg maintenu par un câble de 8 m/m. Cela va rendre le fonctionnement de l’ensemble plus souple.

Puis nous décidons alors d’arrêter là le chantier et de rentrer au QRA. Durant le trajet de retour le moral est nettement moins bon qu’au départ !

NE PAS SE LAISSER ABATTRE !

Pour le câble manquant c’est OK, la commande sera disponible sous huitaine.

Pour le motoréducteur c’est une autre affaire. Je décide alors de solliciter mes anciens collègues du pro sur les différents sites.

Dans l’imprimerie lourde, le matos, de grande dimension, est assez régulièrement renouvelé.

Dès le départ, des opportunités semblent s’annoncer. Finalement c’est dans l’Orne, à TECHNIGRAPHIC que mon ancien collègue Marc PRIEUR va nous dégoter le « gros bébé ».

C’est un ensemble pont-roulant pouvant soulever des bobines de 5 tonnes que nous chargeons dans le camion.

Il comporte deux motoréducteurs dont un avec un arbre de 70 m/m de diamètre 2 mètres de longueur.

Nous avons donc la matière pour construire un arbre symétrique.

C’est une chance. Sans parler de la présence de l’armoire à relais, des fins de courses de haute qualité et de tout ce qui va avec.

Maintenant il va falloir tourner un arbre de 500 m/m de long, 70 m/m au centre et 45 m/m dans les bouts.

Mon tour peut le faire mais je n’ai pas de lunette adaptée si ce n’est un vieux matos pour une autre machine.

Et pour tourner une pièce d’un tel poids nous devons impérativement la prendre en lunette.

Mais comme on dit en pareil cas, « Comment ferions-nous si nous étions dans le désert ? ».

L’ensemble de la lunette est trop bas et le diamètre admissible est inférieur de 3 m/m au diamètre à passer.

Je décide alors de matraquer le diamètre intérieur à la fraiseuse. Cela passe…tout juste.

Ensuite, à grand renfort de cales je vais installer l’ensemble sur le tour. Et ça marche !

Pour l’usinage de l’ensemble, c’est notre ami Philippe F6BTP qui va prendre les commandes.

C’est un vrai professionnel et il va aller beaucoup plus vite que moi. Il y a du copeau à faire.

Une fois usiné, l’arbre est transféré sur la fraiseuse de F6DPH afin de réaliser les différents clavetages de 16 m/m et 14 m/m de largeur.

Il aura fallu la journée complète pour la réalisation de la pièce.

Grâce au professionnalisme de Philippe F8BTP tout va s’enquiller impeccablement au 1/100ème près, c’est un vrai bonheur !

DE RETOUR A LA TOUR

Le moral est bon ! Nous commençons par la mise en place du motoréducteur « le gros bébé » ainsi que du second câble de traction.

Nous y voilà ! Les essais nous confirment une vitesse de 7 mètres/minute et surtout une irréversibilité du motoréducteur lorsque nous libérons le frein électrique.

C’est super. Bon, à ce stade, que nous reste-t-il à faire pour finir cet ascenseur ?

Juste à monter et à fixer les 30 guides de 3 mètres sur la structure, soit 150 perçages de 12 m/m de diamètre sur 20 m/m d’épaisseur.

Encore beaucoup de copeaux !

Pour ce faire, Philippe a investi dans une perceuse à pied magnétique, machine indispensable. Et alors ?

Eh bien le jeu consiste à ce que Philippe et moi-même montions « debout sur le plateau supérieur de l’ascenseur » avec deux barres de guidage, la perceuse et les outils nécessaires.

Ensuite, avec la télécommande, nous mettons en marche jusqu’à arriver à 20 cm de la fin des guides précédents.

Ne surtout pas dépasser !

Puis il faut positionner les guides à l’aide de calibres et de serre-joints.

Enfin, en se décalant bien sur les côtés, c’est-à-dire à raz du vide, il faut percer et boulonner.

C’est finalement très simple et parfaitement conforme à nos prévisions.

Sauf que notre ami Philippe F6DPH n’est pas du tout rassuré. Au début cela va à peu près.

Mais de trois mètres en trois mètres le sol s’éloigne de nous et le plafond reste tellement loin !

D’où cette appellation du « plateau de fromage » car je savais que cela allait être très dur moralement pour Philippe.

Le plus terrible a été lorsque nous sommes arrivés presqu’en haut car il a fallu couper les ailes provisoires du plateau pour passer dans la station.

Dès lors nous démarrions du bas, debout sur notre plateau réduit à 1m15 X 0m75, avec nos barres et nos outils, le tout pour une grimpette de 7 minutes !

Il a souffert notre DPH. Au milieu de la course j’ai cru qu’il allait abdiquer.

Mais non, il a tenu le coup jusqu’en haut et nous avons terminé le travail.

Bravo Philippe, je savais que les situations du genre n’étaient pas sa tasse de thé mais sa volonté lui a permis d’arriver tout en haut.

Bravo encore. Le montage de chaque jeu de barres de guidage nécessitait 1 H 30.

Nous avons donc passé près de 25 heures debout sur le « plateau de fromage » et avons fait une vingtaine de montées/descentes.

Nous avons terminé le travail avec l’installation des fins de courses (deux en série pour le haut), réglages, optimisations etc…

A ce jour l’ascenseur est opérationnel mais peut-être pas de manière complètement satisfaisante…

DEFAUTS A ELIMINER

Au départ Philippe a commandé des câbles de 6 m/m car les deux tambours de son treuil étaient rainurés avec un pas correspondant à ce diamètre.

Je lui ai fait part de mes craintes quant à la petitesse de ces câbles mais il m’a assuré qu’ils étaient prévus pour 2 tonnes chacun soit 4 tonnes pour un levage total de 500 Kg.

Vu sous cet angle…

Au départ nous devions monter le moteur au-dessus de la tour.

Mais cela gênait Philippe par rapport à la rotation de ses paraboles.

Le problème est qu’avec le moteur en bas nous avons le double de longueur de câble !

Ce qui fait qu’avec deux fois 100 mètres de câbles nous observons une élasticité de 10 cm lorsque nous montons à deux dans la cage.

C’est normal mais pas agréable du tout !

Autre défaut, celui de l’enroulement des câbles sur presque trois couches.

A chaque nouvelle couche le chevauchement des câbles génère un claquement suivi d’un petit grognement à chaque enroulement de spire.

Là encore c’est normal mais pas agréable du tout. D’autant que tous les bruits sont très amplifiés dans la tour.

Concernant les sécurités de blocage nous constatons une hyper sensibilité lorsque nous faisons descendre la cage à vide. De sorte que nous avons dû réduire le contrepoids de 210 Kg à 160 Kg.

EN FINALE

Il serait souhaitable de procéder aux modifications suivantes :

  • Installation définitive du motoréducteur au-dessus de la tour. Avec cette nouvelle configuration nous n’aurions plus besoin des poulies de renvoi, la cage étant directement suspendue au treuil.
  • Remplacement des deux câbles de 6 m/m (2T) par du câble de 10 m/m (7T), soit capacité de 14 tonnes pour 500 Kg de charge maximum.
  • Réalisation de deux nouveaux tambours, en mécano soudé, plus gros et plus longs de sorte à n’avoir qu’une seule couche de spires.

Si nous avons le courage de mener à bien ce quatrième volet nous aurons réalisé un superbe outil qui facilitera bien la vie à notre DPH.

A ce jour, l’ascenseur est parfaitement opérationnel et la montée en 7 minutes nous soulage bien des 221 marches, plus l’échelle de 6 mètres !

Pour finir, ces explications vous paraîtront peut-être un peu longues mais en matière de technique il est difficile d’être bref.

73 de Claude F5JPV